Quelles évolutions ont influencé le marché immobilier ces dernières années ?
Depuis la pandémie, nous nous trouvons dans une phase de situations exceptionnelles persistantes – d’abord la crise sanitaire, puis la guerre en Ukraine, auxquelles s’ajoutent d’importants problèmes d’approvisionnement et des coûts de construction en hausse. Début 2023, la hausse fulgurante des taux hypothécaires a suivi, atteignant jusqu’à 3%, un véritable sursaut après des années de taux d’intérêt extrêmement bas. Ce tournant a montré que le marché de l’immobilier ne va pas toujours dans le même sens.
Comment les investisseurs ont-ils réagi à cette évolution?
De nombreux investisseurs ont réagi par de l’incertitude. Les caisses de pension ont atteint leur quote-part maximale de biens immobiliers et ont renoncé à de nouveaux investissements. Les assurances ont réexaminé leurs stratégies. L’immobilier reste une catégorie d’actifs stable, mais la prévisibilité a diminué, d’autant plus que les coûts de construction continuent d’augmenter et que les processus d’autorisation prennent de plus en plus de temps. Ces facteurs doivent être calculés avec précision pour chaque nouvel investissement.
Au cours de l’exercice 2024, la Banque nationale suisse a abaissé son taux directeur à plusieurs reprises, pour la dernière fois à 1,0% en septembre. Cela a-t-il stabilisé le marché?
Oui, la situation s’est détendue et nous regardons vers l’avenir. Mais malgré le bas niveau des taux d’intérêt, les banques accordent des crédits de manière plus restrictive. Les projets financés sont donc moins risqués: la qualité est décisive. Le secteur commercial reste difficile, car de nombreuses entreprises ont modifié leur concept pour les surfaces de bureaux après la pandémie. En revanche, nous constatons toujours une très forte demande dans le segment résidentiel.
Quel est l’impact sur vos projets?
Nous sommes très exigeants lors de la sélection de nouveaux projets. L’emplacement, le potentiel locatif et le prix d’achat doivent correspondre exactement. De plus, nous intégrons un amortisseur de risque dans nos calculs. Nous devons et voulons offrir à nos investisseurs un rendement stable pour leur risque. Le comité d’investissement examine attentivement chaque décision.
Quels sont les avantages d’une fondation de placement de développement par rapport à un véhicule de placement portant sur des biens existants?
Le développement offre la possibilité de concevoir le portefeuille en fonction des besoins actuels: plans optimisés, efficacité énergétique élevée, densification. Nous construisons uniquement des logements très demandés parce qu’ils répondent aux exigences actuelles, tant en matière d’écologie qu’en matière de qualité de vie. En revanche, les fondations de placement avec des biens immobiliers existants sont confrontées à des défis croissants en raison des prescriptions énergétiques plus strictes. De nombreux biens situés à la périphérie ou dont la structure est obsolète ne peuvent plus être rénovés de manière rentable.
Au lieu de tout remettre en question, l’ébauche qui a été retenue pour votre projet «Aeschenplatz» à Bâle mise sur la continuité dans la construction. Y a-t-il donc tout de même du potentiel dans l’existant?
Oui, mais de manière sélective. En tant que véhicule de développement, nous avons l’avantage de sélectionner les projets rentables de manière ciblée. Ce qui compte avant tout, c’est un bon emplacement et une structure solide. Dans ces cas-là, un projet de développement peut s’avérer profitable. Pour identifier de tels projets, notre équipe se donne à fond dans le processus de planification.
Pourquoi l’expérience joue-t-elle un rôle si important dans les activités de développement?
Nous avons été la première fondation de placement axée sur le développement et connaissons parfaitement les tensions entre les exigences des caisses de pension et la stabilité des rendements. Nous avons mené de nombreuses discussions avec des investisseurs institutionnels et nous savons à quoi ils attachent de l’importance: un rendement planifiable et durable avec des risques contrôlés. Selon une enquête annuelle de la Haute école de Lucerne, un track record positif est un critère décisif – et nous pouvons le présenter.
Le changement continuera-t-il d’accompagner le marché?
Nous sommes optimistes pour l’année 2025. Les coûts se sont stabilisés, les taux d’intérêt sont bas et les rendements stables. Le marché de l’immobilier reste attractif, notamment compte tenu de la pénurie de logements. En même temps, nous ne nous reposons pas sur nos lauriers. Les cinq dernières années nous ont appris que les marchés sont fluctuants et les conditions-cadres ne sont pas toujours les mêmes.
Comment gérer l’incertitude?
En l’acceptant et en restant flexible. Si on ne s’adapte pas, on perd. Les besoins en matière de logement évoluent et il faut y répondre, que ce soit par d’autres aménagements ou par des concepts innovants. Par exemple, si les appartements 1 pièce sont moins demandés, nous les combinons en unités plus grandes.
Comment savoir si une tendance va s’imposer?
Tout l’art consiste à ne pas suivre toutes les tendances passagères, mais à identifier les évolutions à long terme. L’expérience aide à distinguer l’essentiel du temporaire. Des thèmes tels que l’efficacité énergétique et la densification resteront pertinents à long terme.
Année après année, la Seraina Investment Foundation dégage des revenus stables pour ses investisseurs. Qu’est-ce qui vous rend si résilients?
Nous disposons d’une équipe bien rodée et d’une solide expérience. Nous mettons l’accent sur des rendements durables et calculons avec prudence. Nous sommes résistants car, depuis notre création en 2016, nous avons opéré dans un environnement exigeant. Notre objectif n’est pas une chasse au rendement à court terme, mais une stabilité à long terme pour nos investisseurs. Notre ancienneté nous aide à prendre des décisions avisées et à traverser les phases de marché incertaines de façon stable.